Corruption dans le secteur de la justice

La corruption est un désastre qui ruine le développement des plusieurs pays partout dans le monde. La République Démocratique du Congo n’est pas également épargnée. Par contre, engouffrée dedans au point de compromettre un lendemain meilleur pour les générations à venir. A cause de la corruption généralisée, la croissance économique de la RDC est au carreau, ces ressources précieuses gaspillées, sa démocratie et ses institutions sont en péril, la qualité de l’éducation reste à désirer, l’accès à l’eau potable et aux soins de santé, la gratuité des services publics constituent un défi… une véritable entrave à la capacité du gouvernement à satisfaire les besoins fondamentaux des citoyens congolais, et le principal obstacle au développement économique et social en RDC.

Plus grand pays d’Afrique francophone, la République Démocratique du Congo possède d’immenses ressources naturelles et une population de près de 80 millions d’habitants, avec ses 80 millions d’hectares de terres arables et plus de 1.100 minéraux et métaux précieux répertoriés. La RDC n’est pas pauvre, elle est mal gouvernée. Elle a les potentiels de devenir l’un des pays les plus riches du continent si la bonne gouvernance est au rendez-vous.

Le rapport de classement de Transparency International sur la corruption de 2020 indique que la République Démocratique du Congo occupe la 170e place sur 179 pays les plus corrompus de la planète. Les experts affirment que ce fléau coûte chaque année plusieurs milliards de dollars à l’Etat congolais. A l’en croire le propos du conseiller de l’ancien Président, Joseph Kabila en matière de la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux, Emmanuel Luzolo Bambi, la RDC perd 15 milliards de dollars par an en raison de la corruption qui mine ce pays.

La corruption est devenue de plus en plus généralisée et banalisée, voire un moyen de réussite dans la société congolaise. Elle frappe de plein fouet même les secteurs le plus vitaux de la vie dans la société congolaise, la justice n’est pas à l’abri. Les tribunaux sont réputés rendre des verdicts favorables aux plus offrants.

…Désormais deux décisions judiciaires sur la table des juges congolais

La justice élève une nation.

Elle est la volonté constante et continuelle de donner à chacun son droit. Elle est l’idéal souvent considéré fondamental pour la vie sociale et une panacée qui protège les personnes, garantit les règles de vivre ensemble, les droits et les devoirs de chacun, les conditions d’une société apaisée. En République Démocratique du Congo, la corruption à caporaliser le service public et surtout la justice, au point de rendre monnayable toutes les prestations de la justice sur lesquels la population compte pour résoudre des litiges et demander réparations pour des griefs. Tout peut désormais s’acheter devant la justice : une décision judiciaire, un certificat d’enregistrement, un certificat de naissance, une attestation de bonne conduite vie et mœurs… ce qui créer une méfiance et limite l’accès de justiciable à la justice.

La bonne marche des affaires de toute nation ou l’émergence d’un Etat de droit repose notamment sur l’efficacité de son système judiciaire. L’Etat de droit se construise autour de six piliers suivants ; la légalité, la sécurité juridique, la prévention de l’abus de pouvoir, la redevabilité et l’égalité devant la loi et l’accès à la justice. L’ancien Ministre de la Justice et Garde des sceaux Alexis Thambwe Mwamba, avait reconnu dans son discours rester célèbre, en marge de l’ouverture de la session extraordinaire du Conseil Supérieur de la Magistrature « Qu’il existe désormais 2 décisions judiciaires au Congo, après avoir entendu toutes les parties en présence. L’une est en faveur de la partie demanderesse, et l’autre en faveur de la partie défenderesse ». Et la victoire judiciaire revient au plus offrant. Comprenez par là une reconnaissance expresse de l’ancien ministre de la Justice que la justice congolaise est gangrenée par la corruption, d’où pour l’emporter, il faudrait corrompre les juges. Celui ou celle qui n’a pas de moyens, part d’avance perdant. Le ministre avait également soutenu que ; « la détention et l’inculpation sont utilisées par les magistrats pour soutirer de l’argent aux justiciables ou encore le juge prépare deux jugements à l’avance, l’un donnant raison à chaque partie au procès, et ces jugements sont montrés aux parties qui subissent un véritable chantage ».

La corruption judiciaire en RDC entre généralement dans deux catégories ; l’ingérence politique du pouvoir exécutif ou législatif dans les procédures judiciaires, d’une part, et la pratique des pots-de-vin, d’autre part. le plus pauvres paye une lourde tribu, d’autant plus qu’ils se voient contraints de payer des pots-de-vin alors qu’ils ont à peine les moyens de survivre.

Comment concrétiser l’émergence du Congo si la justice est corrompue ?

Le peuple congolais est privé non seulement de la liberté de jouissance des ressources et richesses du Congo, suite à la corruption généralisée et au détournement des deniers publics, mais aussi de l’accès pour tous à la justice. Un droit fondamentalement garanti par plusieurs textes et instruments juridiques nationaux et internationaux. Les plus marginalisés sont spoliés de leurs terres, et privés le droit légitime de récupération de ses biens ainsi qu’à une indemnisation adéquate. La corruption a instauré un ordre politique basé sur la loi du plus fort.

L’accès au service public, à la justice et aux richesses réservée à une catégorie des personnes selon les positions et rangs sociaux. Un système fondé sur les anti- valeurs et la mauvaise gouvernance. Les autorités congolaises sont devenues incapables de sanctionner les anti-valeurs car elles sont également trempées dedans. Elles sont conscientes du niveau de la corruption dans le secteur de la justice, mais se contentent de déplorer des conséquences, alors que ce sont eux qui détiennent la clé des sanctions. Sans justice neutre et indépendante capable de réaliser sa mission, rien ne peut marcher au pays. Une méfiance au sein de la population, s’il vaut encore la peine de s’adresser à un tribunal, un parquet ou à une Cour aussi longtemps qu’on sait qu’on n’aurait pas gain de cause si on n’a pas d’argent ? Une justice où la majorité des pensionnaires qui sont dans la prison y demeurent par la volonté des juges qui cherchent à se faire l’argent.

Les juges et les magistrats sont parmi les fonctionnaires les plus corrompus du pays. Les juges abandonnent les poursuites ou prononcent des peines plus légères suite aux pots-de-vin perçus par les justiciables. Dans les milieux ruraux, les juges et autres officiers de justice acceptent la corruption en nature ; tel que : les chèvres et vaches des pauvres villageois, les produits récoltés par les villageois, etc. La justice a été rendu en moule, dépouiller de toute sa substance et sa crédibilité à cause de la corruption qui gangrené le secteur judiciaire. Le rôle du pouvoir judiciaire est de faire appliquer la loi. Les faiblesses structurelles du système judiciaire est un frein à l’émergence de l’état de droit et au développement de la République Démocratique du Congo.

La nécessiter de réformes dans le secteur de la justice

Les juges impartiaux aident à renforcer l’Etat de droit. La corruption et le manque de l’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir exécutif est l’une des raisons de l’incapacité du système judicaire à faire respecter la loi. L’indépendance du pouvoir judiciaire n’est pas garantie dans la moitié des 54 pays africains indique les conclusions du rapport indicateurs d’intégrité en Afrique 2016 produit par Global integrity. L’autonomie dont dispose les juges lorsqu’ils rendent leur jugement reste minime. Certains jugements ne sont pas parfois justifiés. Il est indispensable de poser un diagnostic du fonctionnement de l’appareil judiciaire en RDC, d’évaluer les réformes déjà entreprises et de tabler sur les actions prioritaires qui doivent être mise en œuvre.

Les réformes dans le secteur de la justice congolaise passent entre autres par la nomination des juges qu’il faut à leur place et non ceux susceptibles d’être influencés et corrompus et qui font preuve de compétence et d’intégrité, d’améliorer les conditions de travail des magistrats, révoquer les juges corrompus et exiger la redevabilité et la disciple aux magistrats, exiger la transparence dans les procédures judiciaires en accordant aux médias et organisations de la société civile de contrôler les activités des tribunaux et de dénoncer les cad de corruption judiciaire, renforcer les capacités des juges de manière régulière et surtout renforcer les réglementations solides et rigoureuses en matière de la corruption.

Les réformes dans le secteur de la justice congolaise passent entre autres par la nomination des juges qu’il faut à leur place et non ceux susceptibles d’être influencés et corrompus, d’améliorer les conditions de travail des magistrats, révoquer les juges corrompus et exiger la redevabilité et la disciple aux magistrats, exiger la transparence dans les procédures judiciaires en accordant aux médias et organisations de la société civile de contrôler les activités des tribunaux et de dénoncer les cad de corruption judiciaire, renforcer les capacités des juges de manière régulière et surtout renforcer les réglementations solides et rigoureuses en matière de la corruption.

Les juges doivent être régulièrement mutés dans d’autres juridictions après sur base de critère objectifs, les dossiers doivent être attribués aux juges sur base des critères clairs et objectifs, ils doivent des garanties, bien sûr limitées pour les actes liés à la fonction judiciaire pour ainsi permettre aux juges de prendre des décisions sans craindre d’action ni peur surtout des intimidations des politiciens.

Les juges doivent signer un code de conduite comme référence pour évaluer le comportement du personnel judiciaire, une réglementation rigoureuse sur les politiques de protection des dénonciateurs pour permettre à tous le monde, le médias, la société civile de signaler les manquements suspectés ou avérés au code de conduite ou la corruption d’un juge, d’un administrateur judiciaire ou d’un avocat. Cependant, la publication des rapport annuels sur les activités et dépenses doit être fournie au grand public, les patrimoines des juges déclarés etc.

Au-delà de la répression, il faut éduquer la nouvelle génération

En République Démocratique du Congo, la corruption a atteint un niveau très élevé, au point d’être généralisée, normalisée et institutionnalisée. L’approche punitive a démontré ses limites. Les nouvelles générations doivent être inculqués les valeurs éthiques et de la lutte contre la corruption pour espérer avoir demain une société différente, débarrassée de ce fléau. L’éducation reste le meilleur moyen de lutter à long terme contre la corruption.

S’appuyant sur ces expériences passées, le Centre de Recherche sur l’Anti-Corruption a développé une approche de la responsabilisation des communautés, de redevabilité et de gouvernance participative ou les communautés peuvent demander les comptes auprès des autorités. Il s’agit de renforcement de l’intégrité au sein des communautés (RIC), qui consiste à :

  • Fournir aux membres des communautés la formations, informations, connaissances et renforcement de capacités sur leurs droits, sur l’intégrité, la lutte contre la corruption, la transparence, et les soutenir dans le processus de suivi de la mise en œuvre et du respect de leurs droits ;
  • Créer des groupes conjoints de d’échanges et discussion dans les communautés pour permettre la résolution collaborative des problèmes identifiés au sein de leurs communautés ;
  • Enfin, fournir la plate-forme technologique permettant l’accessibilité et la visibilité en temps réel des données de surveillance pour toutes les parties prenantes.

Cette approche répond à la nécessiter de préparer une nouvelle génération aux valeurs éthiques de redevabilité, de transparence, de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption, étant donné que l’approche punitive a démontré ses limités, le CERC propose l’approche éducative qui accorde une place de choix aux organisations de la société civile dans cette lutte commune contre ce fléau qui ruine le développement des plusieurs millions des congolais dans un pays riche en ressources.

MUSA NZAMU Jonathan,

Défenseur Judicaire près du Tribunal de grande Instance d’Uvira

Responsable de Suivi, Evaluation et Apprentissage au Centre de Recherche sur l’Anti-Corruption